
Monter
le stand de l’I.C.C. lors du Motor Festival d’Avignon offre quelques
avantages, dont celui de découvrir les véhicules exposés avant tout
le monde. Et quelle ne fut pas ma surprise de trouver sur le stand
de nos confrères du Maserati Club de France deux très rares motos
portant la marque du Trident. Un approfondissement les concernant
était de circonstance… Mais avant d’aborder l’histoire de ces deux
roues, une piqûre de rappel concernant la genèse de la marque est
nécessaire. L'histoire de Maserati est avant tout une histoire de
famille et de passion pour la course automobile. Des sept frères
Maserati, tous nés à la veille du XXe siècle, cinq d'entre eux
furent impliqués dans la conception, la réalisation ou encore le
pilotage de ces voitures frappées du célèbre trident. Même Mario,
l'artiste de la tribu, dessina le fameux emblème de la marque.
Carlo, l'aîné,
fut le premier à se lancer. Il fabriqua des vélos, puis des motos et
enfin devint pilote d'essai chez Fiat et Isotta Fraschini. Il se tua
en course en 1910, mais la fratrie ne tarda pas à prendre le relais.
Alfieri et Ettore, engagés en 1922 par la firme Diatto qui voulait
s'impliquer en course, réalisèrent une première voiture : la Type
20. Malheureuse en Grand Prix, la Diatto se révéla rapide et
endurante en enlevant son premier gros succès aux 24 Heures de
Monza, en 1924. La seconde voiture, une 2 litres à moteur 8
cylindres, conçue par Alfieri, fut moins brillante, et son échec
conduisit Diatto à se retirer de la course. En 1926, les deux frères
décidèrent de construire leur propre voiture de course. Elle fut
développée sur la base de la Diatto et prit l'appellation de Type
26. Ce fut la première "vraie" Maserati, qui devint vite la
redoutable rivale des Bugatti. Le décès d'Alfieri, en 1932, fut une
véritable tragédie, non seulement pour sa famille, mais aussi pour
la firme, car il était le moteur de l'entreprise aussi bien sur le
plan technique que financier. Bindo prend alors la direction, Ettore
la direction technique, tandis que Ernesto assure la gestion
financière. Ce dernier sera le maillon le plus faible de la chaîne
et, cinq ans plus tard, les frères Maserati, malgré les succès en
course, apparaîtront comme de bien piètres financiers. Ils seront
alors obligés de céder le contrôle de la société à Adolfo Orsi,
propriétaire d'un important groupe industriel à Modène.
Passionné de
courses, mais peu au fait des problèmes spécifiques liés à
l'automobile, Orsi a l'intelligence de faire signer un contrat de
dix ans aux frères Maserati. Il s'assure ainsi de leur
collaboration, intègre leurs compétences et se protège de la
concurrence qu'ils n'auraient pas manqués de lui faire en reprenant
leur liberté. L'expiration de ce contrat en 1947, suivie peu après
de leur départ, marquera un tournant décisif dans l'histoire de la
marque. Si la course est toujours la principale préoccupation de
Maserati, les premières GT à vocation routière font leur apparition.
Des débuts bien timides d'abord, avec des modèles encore très
proches des voitures de compétition à peine civilisées par de grands
carrossiers comme Pininfarina, Vignale, Touring ou Frua. En 1953, un
nouveau cap est franchi avec une réorganisation totale de la
société, désormais propriété exclusive de la famille Orsi. |
Pendant la
première guerre mondiale, Alfieri Maserati, ouvrit une usine de
bougie d'allumage à Milan, qui fut ensuite transférée à Bologne en
1919. Ainsi, quand en 1937 la famille Orsi pris le contrôle de la
marque Maserati, ils acquirent également l’usine de fabrication de
bougies du même nom. Cette activité annexe connut une forte
croissance, notamment grâce à la fabrication de bougies pour
motocycle, ainsi qu’à une forte propagande publicitaire et au
développement de nouveaux produits comme les batteries ou les
ampoules. Maserati Automobili n’a jamais eu directement de lien, ni
d’influence sur la conception ou la production de ces motos, et ce
marché n’aurait jamais eu de réels effets positifs sur ses ventes
automobiles. On sait juste que Maserati Automobili encourageait son
réseau de distribution à organiser des courses de motos pour leurs
clients.
Au début des
années cinquante, le patrimoine industriel et financé de la famille
Orsi fut partagé entre ses différents membres. Ainsi, Adolfo Orsi
pris la tête de Maserati Automobili, Marcello Orsi récupéra les
affaires de Fonderie de Modène, et la soeur Ida Orsi l'usine de
bougie d'allumage Fabbrica Candele e Accumulatori Maserati.
Une erreur du
notaire rédacteur des actes de partage permit à la Fabbrica Candele
e Accumulatori Maserati de conserver l’utilisation du nom Maserati
ainsi que de son logo.
Le besoin de
moyens de transport bon marché se faisant ressentir en Italie, la
Fabbrica Candele Accumulatori Maserati pris la décision d'entrer
dans le champ de fabrication de moto. Réalisant le coût élevé de
développer une moto en partant de zéro, la direction préféra
intégrer à la firme un fabricant de moto existant déjà. Leurs
attentions étaient tournées vers une petite usine bien établie sur
Bologne, portant le nom d'Italmoto. En 1953, l’entente avec Giuseppe
Migliori, actionnaire principal d'Italmoto, et la Fabbrica Candele
Accumulatori Maserati fut trouvé, permettant le rachat de l’usine de
Bologne.
La production de
moto fut immédiatement transférée aux ateliers de Modène. Maserati
se contenta au début de reprendre la fabrication des produits
Italmoto, en intégrant seulement le logo au trident. Ainsi naquirent
les Tipo 160/T4 (160cc à moteur 4 temps) et les 125/T2 ou 125/TV
(125cc à moteur 2 temps). La compagnie développa en parallèle un
nouveau département pour concevoir et produire leurs propres motos.
Leur premier modèle, la L/125/T2, vit le jour en 1955, fortement
influencée dans sa conception par l’allemande DKW. Puis suivirent de
nouveaux modèles aux cylindrées différentes, variant de 50cc à
250cc.
Le succès initial
de la compagnie dans ce domaine et un déclin dramatique dans la
demande de ses batteries et bougies d'allumage ont forcé Maserati à
concentrer ses efforts vers la production de moto et l'accent a été
mis sur le secteur 50cc.
Les deux produits
phares étaient alors, en 1956, le T2/U (U de l’italien UOMO, homme)
et le T2/D (D pour DONNA, femme) se distinguant principalement par
leurs armatures.
Arrivèrent
ensuite deux modèles 125cc à quatre vitesses, les T2/TV et T2/M, et
deux modèles 50cc à vocation sportive, les 50/T2/S et 50/T2/SS
(surnommé Rospo, crapaud, à cause de sa ligne).
Les quatre
premières années, la demande des motos Maserati était forte, avec
des marchés fermement établis en Amérique du Sud, en Europe et en
Afrique du Nord. Mais en 1957, le Groupe Orsi connut de lourdes
difficultés financières. Il s’en suivit, par exemple, le retrait de
Maserati en Formule 1. La situation empire brutalement au printemps
1958. Maserati est alors mise sous tutelle judiciaire au printemps
et doit renoncer officiellement à toutes compétitions à la fin de
l'année
La concurrence
sur le marché des motos se fit également ressentir avec des marques
telles que Morini, MV Agusta, Benelli, Laverda, etc… Mais ce qui eu
réellement un effet dramatique sur les ventes de motos, c’est
l’arrivée des voitures bon marché de FIAT.
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