Qui ici cinnait cette marque ?
Moi en tout cas, avant la 3ème journée de l'ICC le 12 mars 2005, je n'en avais jamais entendu parlé.
Et, en faisant des recherches sur André Chardonnet, voici sur quoi je suis tombé :
La Siata (Societa Italiana Applicazioni Trasformazioni Automobilistiche) fut créée en 1926 à Turin par Georgio Ambrosini. Elle avait pour vocation de produire des accessoires destinés à embellir les automobiles, principalement les Fiat, ainsi que des pièces qui permettaient d'en améliorer les performances. En 1933, la petite firme parvenait déjà à obtenir une puissance de 48 cv d'un modèle Balilla qui n'en proposait que 22 cv sur la version de série.
Renato Ambrosini succéda à son père avant la guerre. Siata s'était alors déjà fait une renommée avec ses transformations et ses créations originales. Durant le conflit mondial, l'usine fut reconvertie à la production de matériel militaire.
En tant que cible privilégiée, elle fut détruite par des bombardements en 1943.
A la sortie de la guerre, la raison sociale de Siata devint Societa Italiana Auto Trasfarmazioni Accessori. La firme reprit alors son activité de transformation sur base Fiat dans une usine moderne, puis proposa très rapidement de nouvelles réalisations originales et particulièrement attrayantes.
Ainsi, de 1948 à 1952, elle fabriqua un cabriolet doté d'une mécanique Fiat Topolino baptisé Amica. En 1950 fut présentée la Daina sur base Fiat 1400 et diffusée jusqu'en 1958.
Durant les années 60, Siata continuait de produire différents types de carrosseries sur base Fiat. En 1967, année du lancement commercial de la Spring, Siata avait déjà dépassé le stade de petit artisan, et proposait alors une vraie gamme : coupés à carrosseries originales sur base Fiat 850, 1500 et 1600, ainsi que berline 1500 TS à la mécanique élaborée.
La Spring fut l'une des réalisations les plus significatives de toute l'histoire du constructeur Turinois, tant en terme de renommée que de volume de production. Siata destinait cette voiture présentée en 1967 à la jeunesse dorée de l'époque.
Ce spider deux places à pare brise rabattable était dérivé de la Fiat 850 dont il reprenait la mécanique située à l'arrière. La grande calandre de la face avant abritait en fait le coffre à bagages.
La naissance de la Spring devait beaucoup à l'influence d'André Chardonnet, importateur français bien connu des Bristol, Neckar, et autres Autobianchi.
Chardonnet avait eu l'occasion d'évoquer avec Renato Ambrosini l'intérêt que pourrait susciter ce type de voiture rétro sur les marchés européens. Le constructeur italien cherchait alors à relancer son entreprise avec un véhicule susceptible d'atteindre de plus grands volumes de production que ses carrosseries spéciales. Un véhicule original, amusant et économique avait toute les chances de séduire une clientèle jeune et fortunée.
Un premier prototype fut étudié avec une mécanique de Fiat 500. Mais les performances furent jugées insuffisantes. Le moteur plus largement dimensionné de la Fiat 850 devait alors faire l'affaire. Le prix d'un tel engin se devait d'être compétitif pour attirer une large clientèle. C'est ce qui explique l'adoption d'une mécanique peu coûteuse, d'entretien facile, ayant fait ses preuves en grande série.
Pour séduire les acheteurs, il ne fallait pas craindre un peu d'excentricité. Pourquoi ne pas adopter un style banal et courant durant les années 30, mais devenu décalé 30 ans plus tard. Une carrosserie de type Torpédo à échelle réduite répondait tout à fait à cet objectif. Celle de la Spring se caractérisait par un long capot moteur, des roues à rayons, une roue de secours apparente à l'arrière, des phares sur les ailes, des portières incurvées, etc ...
Pour la petite histoire, la Spring ne faisait que s'inspirer d'une autre création du même Siata, la Rallye (photo ci-dessous), produite de 1951 à 1958, qui elle même s'inspirait à l'époque des MG TD britanniques.
Mais pourquoi "Spring". On peut proposer deux interprétations. S'agissait t'il d'une "spring car", voiture suspendue en anglais, pleine de "ressort", ou d'une auto du "printemps" grâce à sa capote !
La Siata fut l'une des initiatrices d'un nouveau courant qui se développa à partir des années 70, les pseudo-répliques, qui allait donner naissance aux Ruska Regina néerlandaises, Suncar Arpège françaises, et autres productions britanniques telles que Arkle, Lighspeed, Marlin, Spartan, etc ...
La presse automobile s'intéressa de près à ce véhicule marginal. Le mensuel L'Automobile présentait ainsi la voiture dans son numéro de juin 1967 : " Une silhouette d'hier va bientôt être proposée aux jeunes d'aujourd'hui. La mode étant un continuel retour aux sources, il ne faut pas s'étonner si les stylistes transalpins d'avant-garde ont réalisé ce cabriolet qui s'apparente avec ceux qui firent le bonheur de nos grands-pères lorsque, jeunes, ils voulaient séduire nos grands-mères. Les heureux possesseurs de cette étrange " nouveauté " ne pourront se voir jeter la pierre par leurs aînés (et grands aînés) dont les années folles se passèrent au volant de tels roadsters.
A l'avant, les goûts démocratiques de certains et ceux plus aristocrates des autres y trouveront chacun leurs satisfactions réciproques : de chaque côté d'une calandre de Rolls Royce dernier cri, on trouve deux ailes surmontées de deux phares qui rappellent incontestablement ceux de notre 2 CV nationale. Le profil et l'arrière donnent aussi cette impression de déjà vu, mais n'est-ce pas aussi bien si cette silhouette plaisait et sait plaire encore. Côté moteur, pas de surprise. Les qualités techniques éprouvées du 850 Fiat ne sont plus à vanter.
Autre avantage de ce choix de la base mécanique : facilité d'entretien puisque tout agent Fiat en connaît le moindre recoin et en possède le plus petit boulon.
Coté caisse, des éléments démontables (ailes, marche pieds, phares) assurent réparations et échanges faciles et moins onéreux ".
JP Thevenet, bien connu des lecteurs du mensuel L'Automobile, relatait dans un essai de septembre 1967 : " On ne trouve en effet ni vide-poches au tableau de bord, ni cendrier, ni pare-soleil et pas le moindre éclairage intérieur. Dans les choses présentes mais discutables, nous retiendrons des portes réalisées avec des lanières trop fragiles pour ne pas se rompre rapidement, la surface de balayage des essuieglace d'une rare avarice sur la partie droite du pare-brise, un appui des balais plus que précaire.
Mais c'est encore à la capote que nous décernerons la palme de la médiocrité ... tout cela nous semble avoir été abordé et résolu de façon assez désinvolte ...
Au delà des 100 km/h, les bruits d'air surpassent en qualité et en quantité toutes les autres manifestations sonores de la voiture. ... Par forte pluie, on a plus l'impression d'être sous la capote d'une automobile mais plus réellement sous un abri de fortune ... "
L'auteur de l'essai reconnaissait tout de même à la Spring " des performances raisonnables pour sa catégorie, une boîte de vitesse maniable, une direction douce et précise, un réel confort de suspension , un freinage satisfaisant ". Mais surtout, et c'est sans doute là la raison d'être de cette automobile " Il faut noter que nous avons été l'objet d'une curiosité et d'un intérêt qui, devant un drugstore ou tout autre temple dans lequel se pratique le culte de la jeunesse moderne, plongerait le possesseur d'une Rolls dans l'anonymat le plus complet "
En 1969, la Spring 850 était affichée à 9568 francs. A titre de comparaison, une Simca 1000 Special valait 9515 francs et une Matra M 530 la somme de 18 510 francs. Le prix était selon son importateur André Chardonnet " l'arme la plus dangereuse de cette Fiat 850 habillée à la mode d'avant hier ".
Siata ne fut par le seul constructeur italien à occuper ce que les experts en marketing allaient appeler une vingtaine d'annés plus tard une " niche " de marché.
D'une part, Alfredo Vignale présenta au salon de Paris 1967 la Gamine, d'autre part, Zanella, un concessionnaire Fiat à Parmes, commercialisa l'Erina. Ces deux voitures prenaient pour base la mécanique de la Fiat 500.
La rentabilité économique de ce type de production demeurait très aléatoire.
Environ 3500 Spring virent le jour entre 1967 et 1970, avec une cadence de production qui atteignait au plus fort 13 voitures quotidiennes. La Spring était vendue en Italie, mais aussi en France, en Allemagne, et aux Etats Unis.
Le réseau de distribution était inquiet à l'idée de réussir à vendre cette voiture marginale. Les remises étaient fréquentes. Paradoxalement, l'usine ne parvint pas à suivre la demande, notamment à cause d'une grêve qui dura quatre mois.
D'un côté des clients irrités, de l'autre des concessionnaires aux aguets, il n'en fallait pas plus pour mettre en péril une entreprise.
La Spring fut le modèle le plus produit par Siata, mais ce fut aussi la dernière création de ce petit constructeur qui fut contraint de suspendre la fabrication en 1970, avant que la société ne ferme définitivement ses portes en 1974. Les droits de production sur la Spring furent rachetés par la firme Orsa, sans que cela ne déboucha sur aucune reprise en série de la production. Quelques caisses fabriquées chez Siata furent équipées de moteur Seat 850.
Ci-dessus, Siata Daina Sport - Ci-dessous, Siata 1400 Grand Sport
Et en effet, on se replongeant dans la Revue de l'ICC N°4 et son article sur la Fiat 850, on retrouve bien quelques photo de la SIATA SPRING page 61.